Actualités | 15.04.2021
L’ATIBT présente ses condoléances les plus sincères à la famille et aux proches du Dr Alain Marius Ngoya-Kessy, décédé le 10 avril 2021.
La cinquantaine révolue, Alain Marius NGOYA – KESSY était l’un des dignes fils du Congo sur lequel la filière forêt – bois peut compter. En effet, Ingénieur économiste forestier, formé à l’Académie des techniques forestières de Saint Petersbourg en ex URSS, détenteur d’un doctorat PhD en économie forestière de l’Université forestière d’état de Moscou en 1997 option gestion forestière, disciple de l’académicien et Professeur russe Anatoly Pétrov, Alain Marius NGOYA – KESSY a voué toute sa vie à la gestion durable des forêts congolaises dans l’optique de la transformation plus poussée et diversifiée des ressources telles que : le bois, les PFNL, la faune et les aires protégées.
En 2002, il obtient une bourse dite “jeunes cadres“ de la FAO sous la supervision du Dr Oudara Souvanavong pour une courte formation sur l’enseignement forestier à l’université forestière de Salé au Maroc. En 2007, il est Lauréat du premier programme des bourses de formation post doctorale de l’OIF pour un stage d’une année en France au sein du CIRAD à Montpellier et à l’ENGREF à Nancy. Alain Marius NGOYA – KESSY se perfectionne à l’économie de l’environnement sous la supervision du professeur Harou et du Dr Guillaume Lescuyer . Il développe à cette occasion des contacts scientifiques avec le Dr Alain Karsenty. Avec tous ces hauts diplômes et exerçant depuis déjà plus de 20 ans, l’homme acquiert de l’expertise et de l’expérience grâce à sa position d’enseignant à l’université Marien Ngouabi (ENSAF) et aux hautes fonctions dans l’administration forestière. En effet, de 2002 à 2014, il fut successivement directeur des Études et de la Planification, Conseiller du ministre Henri Djombo et Directeur de la valorisation des ressources forestières.
Notre scientifique parle couramment 4 langues européennes et 5 langues congolaises. Atypique, il est devenu spécialiste en industries du bois, en économie forestière et du bois, en économie de l’environnement et en développement durable. Il fait partie de l’équipe d’investigation sur le projet “Maison Bois“ pour rehausser la valeur du matériau bois au niveau national. Pour lui, la forêt représente quelque chose de sacrée, « elle existe bien avant l’homme et lui permet de subvenir à tous ses besoins depuis la nuit des temps…depuis le commencement. Elle est source de biodiversité, d’oxygène, d’aliments, de pharmacopée, d’inspiration etc. Des scientifiques états-uniens ont montré que les arbres communiquent entre eux par le ruissellement des eaux de pluie et le système racinaire ». Le Congo est couvert à 75% par la forêt, que pense t-il de la gestion actuelle des forêts congolaises ? Notre expert, à l’aise dans son domaine, ne reste pas avare. « Les forêts congolaises peuvent être mieux gérées. En dehors des superficies attribuées à la CIB Olam et à IFO, le reste des superficies mérite une prise en main réelle afin d’améliorer les performances économiques, sociales et environnementales. Nous avons régressé du point de vue de la transformation plus poussée et diversifiée du bois. La formation des cadres et le renforcement des capacités ont reculé, nous manquons de l’expertise dans tous les segments de la foresterie. Ce qui se traduit par l’utilisation du personnel admis à faire valoir ses droits à la retraite », écrit-il.
Enseignant chercheur à l’université Marien Ngouabi, Alain Marius NGOYA – KESSY transmet son amour pour la forêt à travers les cours liés à la politique forestière, au commerce des bois tropicaux, africains, à la certification forestière et à la traçabilité des bois. Aux jeunes qui ont l’impression que ce secteur est fermé, il rétorque : « Les jeunes connaissent mal ce secteur. Cela est dû au manque de formation et de promotion. Les médias devraient davantage parler de ce secteur très porteur. Il y a aussi la mauvaise conception des jeunes qui trouvent toujours à redire sur les métiers proches de la nature. Les jeunes préfèrent s’engouffrer dans les secteurs saturés comme l’économie, les finances, le droit, etc. Je leur suggère par cette occasion d’étudier l’économie forestière et de l’environnement, le droit forestier … »
En 60 ans d’indépendance, le Congo a formé un seul docteur en économie forestière ! c’est le Dr NGOYA – KESSY , consultant international pour les organisations suivantes : Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement, Organisation Internationale des Bois Tropicaux, Commission des Forêts de l’Afrique Centrale, Association Technique Internationale des Bois Tropicaux …il est l’auteur de plusieurs publications, ouvrages et rapports techniques ayant contribué et contribuant toujours à modifier les pratiques dans la gestion forestière au Congo. On peut citer : “Létat des lieux des acteurs privés de la filière forêt – bois au Congo en 2019“ ou « La prise en compte des PFNL dans la valeur économique des pays de la Comifac en 2020 ». Initiateur de la fiscalité FOT, ses réflexions et contributions ont quasiment fait quadrupler les recettes forestières du Congo.
Passionné du savoir, les sciences spirituelles ne sont pas restées en marge de sa personnalité. Aussi a-t-il inscrit sa pensée parmi tous nos grands panafricanistes, traditionnels qui prônent la réconciliation des Africains avec leur histoire et la retranscription équitable des valeurs culturelles. Il a parcouru le monde, l’Afrique en particulier. D’ailleurs, parmi ses derniers mémoires, lumière a été faite sur l’égyptologie … Embrasé par un amour sans pareil pour les siens et pour cette jeunesse congolaise, aspirant à un avenir meilleur, il mène entre 2005 et 2015 un discours politique sans équivoque renvoyant au dogme pur de l’art de gérer la nation. Dommage que le paradoxe étant grand dans ce domaine, il en tire sa révérence en 2015 ! Depuis lors, notre savant s’est entièrement voué à la recherche approfondie sur des sujets tant d’actualité que ceux liés à son domaine de prédilection ou à bien d’autres pour lesquels il en est friand jusqu’à ses derniers jours.
Né le 8 avril 1966, à Brazzaville, il décède le 10 avril 2021 à Pointe Noire. Il nous quitte marié et père de 9 enfants. Nonobstant la famille biologique, son cercle collégial et amical reste cette essence rare qui a disparu du paysage national.
Fort de son vécu, et de ce qui se dessinait dans un avenir proche, il sied de mentionner que le Congo, l’Afrique et le monde scientifique ont perdu un repère.
Le Dr ALAIN MARIUS NGOYA-KESSY a été inhumé mercredi 14 avril 2021 dans la ville de pointe Noire.
RIP ! A jamais dans nos cœurs
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