Actualités | 23.04.2021
Alors que les forêts tropicales sont confrontées à de nombreuses menaces, qu’il s’agisse du réchauffement climatique ou de la conversion de zones forestières en terres agricoles, le WWF a publié ce mois-ci une étude intitulée « Quand les Européens consomment, les forêts se consument ». Le rapport y déplore la responsabilité de l’UE dans la déforestation des forêts tropicales. C'est aussi un rappel quant à l'importance de leur gestion forestière durable.
Entre 2005 et 2017, environ 65 millions d’hectares de forêts tropicales (5 millions par an) ont été convertis à l’agriculture pour la culture du palmier à huile, du soja ou encore l’élevage bovin. Les importations de l’UE représentent 16% de la déforestation liée au commerce mondial. Le rapport montre en effet un lien clair entre la consommation européenne et la déforestation : les produits importés par l’UE sont issus de zones où les plantations, pâturages ou cultures s’étendent sur des écosystèmes naturels sensibles, notamment dans le Cerrado et l’Amazonie au Brésil, et le Chaco en Argentine et au Paraguay, « points chauds » de la déforestation. La demande européenne provoque ainsi des conversions de terres dans les principaux fronts de déforestation identifiés.
En outre, le commerce international exerce une pression accrue sur des régions jusque-là moins touchées par la dégradation des forêts. De nouveaux fronts de conversion apparaissent, notamment en Afrique occidentale et centrale et dans la région du Mékong en Asie du Sud-Est. Or, les règlementations des pays producteurs ne suffisent pas à protéger les écosystèmes forestiers : « même en l’absence de déforestation illégale, 7 millions d’hectares de terres au Paraguay, 10,5 millions d’hectares en Argentine et 88 millions d’hectares au Brésil pourraient encore être légalement convertis » déplore le rapport.
Il est donc indispensable que les pays consommateurs adoptent des mesures efficaces pour cesser de détruire les forêts tropicales. Parmi les États membres de l’UE, la France fait partie des principaux responsables de la déforestation importée, en particulier pour ses importations de soja destiné à l’alimentation animale (plus de 3 millions de tonnes par an selon le WWF) et ses importations d’huile de palme pour le diesel. En 2018, elle s’est pourtant engagée à combattre la destruction des écosystèmes forestiers en adoptant une Stratégie Nationale de Lutte contre la Déforestation Importée (SNDI). Alors que la France assurera la Présidence de l’UE au premier semestre 2022, le WWF France appelle le président de la République à faire de l’adoption d’une législation européenne contre la déforestation une priorité de son agenda.
Ce rapport est une bonne occasion de rappeler la pertinence du modèle de la gestion durable des forêts pour préserver les ressources forestières dans les pays tropicaux. D’une part, l’utilisation de bois tropical certifié donne une valeur économique à la forêt : lorsque le bois est source de revenus, les pays producteurs sont moins enclins à convertir les zones forestières en terres agricoles. Néanmoins, pour s’inscrire dans une logique de préservation des écosystèmes, le bois importé par l’UE doit être produit en accord avec les principes non seulement de la légalité, mais aussi de la certification gestion durable des forêts.
En reconnaissant les producteurs certifiés comme des acteurs de premier plan dans la protection des forêts tropicales, en adoptant des politiques publiques promouvant le bois tropical certifié pour ses qualités techniques, économiques, environnementales et sociales, l’UE peut se donner les moyens de mettre en place un nouveau modèle de commerce responsable. Cette ambition doit passer par une tolérance zéro envers le bois illégal et la promotion de la certification, ce qui nécessite d’instaurer un suivi efficace du marché du bois de l’UE.
À cette fin, le WWF a défini 8 priorités pour garantir une législation européenne efficace, à consulter dans cette note.
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